Télétravail : l’assurance aurait-elle perdu son avance ?

La dernière étude de la DARES porte sur les accords signés sur le télétravail dans les entreprises françaises : 4 070 accords d’entreprise ont été signés en 2021, soit 10 fois plus qu’en 2017.

La tendance a sans surprise explosé depuis la crise sanitaire, y compris au sein des petites structures, même si les entreprises ayant des habitudes de négociation ancrées restent largement majoritaires.

Si de plus en plus de secteurs s’y mettent, celui de l’assurance et des activités financières, pourtant pionnier sur le sujet, est le seul à voir sa part d’accords signés diminuer. Symbole de pratiques managériales et RH renouvelées, la généralisation de la possibilité de télétravailler reste pourtant un lever majeur d’attractivité et de renouvellement du secteur.

Le télétravail bien ancré dans les mœurs des entreprises

Le nombre d’accords collectifs portant sur le télétravail est passé de 390 en 2017 à 4 070 en 2021 : la crise sanitaire est bien entendu passée par là : 56 % des accords ont été signés en cours d’année 2020, conduisant de nombreuses entreprises à « réorganiser leur mode de fonctionnement en tenant compte des attentes des salariés. »

Si la crise sanitaire avait logiquement amené les entreprises à mettre en place des mesures de télétravail à titre exceptionnel afin de maintenir leur activité, 71% des accords signés concernent en revanche l’organisation du télétravail « régulier », en dehors de toute situation exceptionnelle ou cadre de crise.

La majorité des accords (52%) prévoit la possibilité de télétravailler jusqu’à deux jours par semaine : seuls 21% n’autorisent qu’un jour et 15%, trois. En revanche, le full remote c’est-à-dire le télétravail à 100% reste très rare puisque moins de 5% des accords prévoient ce cas de figure.

Le télétravail reste naturellement bien encadré et de façon générale, les entreprises prennent leurs précautions en prévoyant des clauses de réversibilité : dans les deux tiers des cas, l’entreprise a ainsi la possibilité de revenir sur ses choix, voire bénéficie d’une période d’adaptation dans 54 % des accords, « une sorte de phase de test pour évaluer le dispositif mis en place. » Naturellement quelles que soient les formules prévues, la définition des jours de télétravail doit se faire en accord avec les managers.

La forte progression des PME et TPE

La Direction des Statistiques du Ministère du Travail relève la « diffusion du télétravail à de nouveaux profils d’entreprise, comme les petites structures. » En effet, les grands groupes ne sont plus les seuls à opter pour le télétravail : « la part des accords signés par des unités employant moins de 50 salariés augmente continûment depuis 2017, passant de 8 % à 21 % en 2021. Près de la moitié des accords de télétravail provient de structures employant entre 50 et 299 salariés. »

Cependant en parallèle, le nombre d’accords progresse au sein des entreprises « quelles que soient leurs tranches de taille. » L’élément le plus susceptible de faire la différence réside dans les habitudes et l’organisation des entreprises en matière de dialogue social et de négociations : « les entreprises aguerries au dialogue social et ayant des habitudes de négociation ancrées sont largement majoritaires », note le rapport. En effet au 1er semestre 2021, « trois accords sur quatre proviennent d’entreprises ayant a priori l’habitude de négocier, cette habitude est définie ici par la conclusion de 5 textes ou plus au cours de trois dernières années. »

La part des accords de télétravail dans l’assurance a diminué, l’industrie premier secteur à télétravailler

Depuis 2018, l’industrie ainsi que les activités spécialisées, scientifiques et techniques sont les secteurs les plus représentés dans la signature d’accords sur le télétravail : l’industrie est ainsi passée de 63 accords signés en 2017 à 864 accords actuellement.

Autre progression spectaculaire, celle des secteurs du commerce de gros, des transports, de l’hébergement et de la restauration avec une hausse de 225% par rapport à 2019. Enfin dans l’administration publique, l’enseignement, la santé et l’action sociale, les accords ont été multipliés par 3 depuis 2019.

En revanche, le rapport souligne que « la part des accords de télétravail signés dans les activités financières et d’assurance diminue, passant de 21 % en 2017 à 10 % en 2021. » Cependant, il ne s’agit pas d’un retard à proprement parler du secteur de l’assurance en la matière : en réalité les entreprises concernées avaient déjà mis en place des dispositifs de télétravail avant la crise sanitaire.

Comme l’indique le rapport, « dans ce secteur, le développement du télétravail date d’avant la crise du Covid-19 : dès 2018, 8 % des accords y étaient signés au niveau des groupes contre 3 % par exemple dans le secteur des activités spécialisées. » Par ailleurs, la part d’avenants à un accord dans les activités de finances et d’assurance « y était plus importante qu’ailleurs (18 %). »

Ainsi aujourd’hui, le nombre d’accords de télétravail passés dans le secteur des activités financières et d’assurance représente 9% des 922 accords et avenants signés et déposés entre le 1er janvier et le 30 juin 2021, à la date de la réalisation de l’étude.

Des problématiques persistantes sur l’indemnisation des frais et le suivi médical

Si 81% des employeurs fournissent au personnel en télétravail un ordinateur portable et parfois d’autres équipements, en revanche moins de la moitié des accords prévoient une indemnisation des frais occasionnés par le télétravail.

Lorsque c’est le cas, les accords se contentent généralement d’indemnisations journalières de 2,50 € ou mensuelles de 10 €. Le rapport de la DARES précise que « parmi les accords ne prévoyant pas de prise en charge, certains employeurs justifient cette position en rappelant que le télétravail est un choix du salarié. » Un sujet certainement amené à provoquer de nouveaux débats et discussions au sein des entreprises, compte tenu de l’inflation actuelle et de la hausse des prix du gaz et de l’électricité…

Autre carence, celle des dispositifs de prévention et de suivi médical à distance, qui restent particulièrement rares. Si les accords comprennent fréquemment des rappels sur le droit à la déconnexion et des clauses relatives à la prévention des risques et aux obligations de santé, pour autant « peu de dispositifs de prévention ou de sécurité spécifiques et adaptés à un recours au télétravail accru » sont mis en place dans les entreprises.

En effet à la date de la réalisation de l’étude, seuls deux accords prévoyaient la visite du lieu de télétravail par le médecin du travail, et deux autres la mise en place d’une cellule de soutien spécifique pour lutter contre l’isolement. Pourtant comme le souligne la DARES dans son rapport, « de telles dispositions seraient une manière de répondre à la dégradation constatée des conditions de travail et de l’état de santé des télétravailleurs. » Voilà un sujet dont pourraient s’emparer les assureurs, notamment les mutuelles de santé

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