Proche aidant en zone rurale : une situation difficile et couteuse

Comme chaque année le 6 octobre, la Journée Nationale des Aidants accueille de multiples initiatives d’information et de soutien aux aidants, tout en appelant à davantage de mobilisation des acteurs publics et privés autour de ces situations.

Si les mentalités évoluent doucement, les difficultés et le sentiment d’isolement semblent davantage marqués auprès des 3 millions d’aidants vivant en zone rurale : c’est ce que met en lumière l’enquête nationale de l’institut Ipsos « AIDANTS ET RURALITÉ : Vivre en zone rurale, quel impact sur la vie des aidants ?[1] », tout juste publiée pour le compte de la MACIF.

Qui sont les aidants en zone rurale ?

Mettant l’accent sur les spécificités propres au territoire rural, l’enquête a notamment délivré les informations suivantes :

  • 25% des aidants en France vivent en zone rurale, soit 3 millions de personnes
  • 64% des aidants en zone rurale sont des femmes, contre 49% au sein de la population générale des aidants
  • dans les zones rurales, l’âge de la personne aidée constitue le motif pour lequel elle a besoin d’aide dans 64% des cas, contre 53% dans la France entière. Ainsi les proches aidés sont le plus souvent des ascendants : les parents et beaux-parents regroupent 55% des personnes aidées en zone rurale.

En zone rurale, le rôle d’aidant est plus difficile

Le constat de l’enquête est sans appel : les difficultés classiques liées à l’exercice d’un rôle d’aidant se renforcent en zone rurale, le sentiment d’isolement, d’éloignement et de désertification médicale étant encore plus fort que dans les villes.

  • Dans près de trois quarts des cas, la personne aidée vit dans son propre domicile (74%). Et dans ces situations, les sondés ont répondu à 74% que le logement de la personne aidée « n’est pas ou plus adapté à ses besoins et aux difficultés rencontrées. »
  • En conséquence, 4 aidants ruraux sur 10 déclarent « avoir envisagé ou même engagé des démarches pour adapter ce logement ». 28% d’entre eux ont aussi envisagé un déménagement.
  • 23% des aidants déclarent s’occuper seuls de la personne aidée.

Au final pour 60% des aidants interrogés, « vivre dans un territoire rural rend leur rôle plus difficile ».

Les dispositifs d’aides, entre méconnaissance et méfiance

Un autre point noir mis en lumière par cette enquête concerne le manque d’information sur les dispositifs et organismes pouvant soutenir les aidants, notamment au niveau local. Si ce constat pourrait valoir aussi pour le milieu urbain, le résultat s’aggrave en ce qui concerne les zones rurales : « moins d’un aidant sur deux s’estime bien informé sur les associations locales (45%) et les dispositifs d’aides auxquels il peut avoir accès (40%) » En conséquence, rares sont les aidants qui déclarent avoir bénéficié de dispositifs ou de services mis en œuvre par leur commune (seulement 13%) ou leur intercommunalité (15%).

Mais au-delà du seul manque d’information, l’enquête révèle une situation plus complexe encore : plus du tiers des aidants en zone rurale (35%) ont déclaré « connaitre l’existence de ces aides sans pour autant les avoir mobilisées auprès de leur proche en situation de dépendance. » Alors que dans le même temps, 54% des aidants ont convenu « qu’un de ces accompagnements comblerait un vrai besoin. » Parmi les explications données à ce décalage, le refus de la personne aidée constitue la principale raison avancée par les aidants ruraux (33%). Mais par ailleurs, plus du quart des aidants ruraux déclarent « ne pas savoir à qui s’adresser » (28%), traduisant là encore un sentiment d’isolement.

Un impact financier non négligeable

Sujet tabou par excellence, la question financière fait partie intégrante des problématiques auxquelles les aidants sont confrontés. Là encore, le fait de vivre en zone rurale constitue un facteur aggravant, les distances étant généralement plus éloignées qu’en ville, avec des offres de transport moins denses.

  • la distance moyenne parcourue par les aidants ruraux est d’environ 80 km par semaine, s’établissant même à plus de 100 km lorsque l’aidant est seul à intervenir auprès de son proche.
  • 8 aidants ruraux sur 10 utilisent leur propre voiture pour se déplacer.
  • 3 aidants ruraux sur 5 considèrent le coût de ces déplacements comme important (60%).

Au vu des coûts générés, et ce dans le contexte actuel d’inflation et d’augmentation du carburant, 58 % des aidants ruraux ont été amenés à « réduire leurs déplacements pour le proche qu’ils aident. » Un constat inquiétant non seulement pour les personnes aidées qui se retrouvent pénalisées, mais aussi pour la santé mentale des aidants eux-mêmes, tiraillés entre leur volonté d’aider leur proche et leurs contraintes financières, familiales et professionnelles, au risque d’éprouver un sentiment de culpabilité.

57% des Français envisagent de devenir aidants un jour

En définitive, les enseignements de cette enquête soulignent l’ampleur des défis à relever. Pour 63% des aidants ruraux, les sentiments négatifs prédominent : fatigue, solitude, isolement, outre le coût important représenté dans le budget.

Des défis qui ne feront que grandir avec le temps du fait du vieillissement de la population : c’est ce qu’a mis en évidence, si besoin en était encore, le 8ème Baromètre des aidants publié par la Fondation APRIL, faisant un état des lieux plus général sur la situation des aidants en France, mais délivrant des enseignements similaires :

Conclusion : les besoins croissants d’accompagnement des aînés ne sont toujours pas assez valorisés et reconnus au sein de la société française.

Rappel : Le 6 octobre 2022 – Salariés aidants : comment les aider ?

A l’occasion de la Journée Nationale des Aidants, l’OCIRP a organisé une émission en visioconférence, en direct de la Maison de la Radio, sur le thème : « Salariés aidants : comment les aider ? », en partenariat avec l’ANDRH et l’ORSE.

Les résultats de la 2ème étude de l’Observatoire OCIRP Salariés aidants, centrée sur le rôle de l’entreprise (politiques RH et RSE) et des partenaires sociaux dans le soutien aux salariés aidants, y ont été dévoilés.

[1] Méthodologie : dispositif quantitatif mené par internet du 19 au 22 juillet 2022 via l’Access Panel Online d’Ipsos auprès de 500 aidants vivant en zone rurale (moins de 5000 habitants) âgés de 16 ans et plus. Echantillon non pondéré.

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