Une récente enquête MACSF et Prévention Routière souligne la volonté des soignants de renforcer leurs compétences en prévention routière. Ils préconisent un cursus plus complet pour mieux protéger les conducteurs, assister les patients et anticiper les enjeux de demain.
Au mois de décembre 2024, une étude conjointe de la MACSF et de l’association Prévention Routière a révélé que neuf professionnels de santé sur dix souhaitent bénéficier d’une meilleure formation à la prévention routière au cours de leurs études médicales ou paramédicales. Cette tendance marque une nette évolution par rapport à la précédente enquête menée il y a six ans, notamment en ce qui concerne la perception de leur responsabilité ou l’intérêt d’un questionnaire médical pour le renouvellement du permis de conduire.
Un rôle de prévention confirmé
Selon les données recueillies, 82 % des soignants interrogés reconnaissent avoir un rôle spécifique à jouer dans la sécurité routière, soit six points de plus qu’en 2018. Chez les médecins, ce pourcentage atteint même 95 %. Les auteurs du sondage y voient un signe fort d’évolution, conforté par le désir, exprimé par 87 % des répondants, d’intégrer une formation spécialisée en prévention routière dans le cursus initial. Beaucoup estiment qu’un tel module académique contribuerait à améliorer la relation soignant-patient et à anticiper les situations à risque au volant.
« Face aux enjeux révélés par cette enquête, l’association Prévention Routière appelle à faire de la prévention des risques routiers un pilier de la santé publique, au cœur de la relation soignant-patient. Les médecins et professionnels de santé ont un rôle essentiel à jouer pour préserver l’équilibre entre l’autonomie, le bien-être et la sécurité des patients. » souligne Sophy Sainten-Bourguignon, Déléguée générale de l’association Prévention Routière.
L’enjeu de la responsabilité médicale
Au-delà du besoin de formation, le sentiment de responsabilité se renforce chez les médecins : 69 % craignent désormais d’être tenus pour responsables en cas d’accident provoqué par un patient atteint d’une pathologie pouvant altérer son aptitude à conduire, qu’ils en aient été le premier prescripteur ou non. Depuis l’arrêté du 28 mars 2022, les médecins doivent en effet informer leur patient si une maladie ou un traitement médicamenteux peut compromettre la sécurité au volant.
« Le médecin traitant doit pouvoir apporter la preuve qu’il a pris toutes les mesures utiles pour informer son patient des effets de son état de santé et de son traitement sur son aptitude à conduire un véhicule. C’est pourquoi il est conseillé de laisser une trace de ses échanges avec le patient dans le dossier médical, ainsi que du courrier qu’il pourrait avoir rédigé et remis au patient pour le médecin agréé par la préfecture. La responsabilité du médecin, sur le plan civil, ne pourrait être engagée que s’il est établi qu’il a manqué à son devoir d’information. » précise Nicolas Gombault, directeur général délégué du groupe MACSF.
Cependant, le secret médical constitue une limite stricte : les professionnels de santé ne peuvent pas imposer l’arrêt de la conduite ni signaler un patient aux autorités sans porter atteinte à la confidentialité des données de santé. L’enquête révèle ainsi que 53 % des soignants se disent défavorables à l’idée de déroger à ce secret concernant la conduite, une proportion qui atteint 60 % chez les médecins.
Le médecin agréé : un acteur clé
Bien que le praticien référent ne puisse contraindre son patient à cesser de conduire, il peut l’orienter vers un médecin agréé par la préfecture, habilité à évaluer l’aptitude à la conduite. Selon l’étude, 61 % des médecins déclarent avoir déjà adressé au moins un patient à ce type de spécialiste, et 27 % le font même une à deux fois par an.
Par ailleurs, la connaissance des obligations légales s’est accrue. Désormais, 88 % des médecins savent qu’en cas de pathologies déterminées par la réglementation, un avis d’un médecin agréé est obligatoire, sous peine d’engager une responsabilité pénale pour le patient et de réduire sa couverture d’assurance. À l’appui de ces démarches, la Sécurité Routière diffuse depuis 2022 un mémento destiné aux médecins appelés à conseiller un patient-conducteur.
Vers un suivi médical renforcé
L’enquête met aussi en évidence la volonté de bon nombre de professionnels de santé d’étendre les évaluations d’aptitude à la conduite. Ainsi, 77 % des répondants se disent favorables à une visite médicale obligatoire tous les quinze ans pour tous les conducteurs. Parallèlement, plus de deux tiers envisagent positivement la mise en place de questionnaires médicaux lors du renouvellement du permis de conduire, que ce soit sous forme d’autodéclaration par le patient (69 %) ou via un professionnel de santé (67 %).
Néanmoins, cette évolution réglementaire n’est pas à l’ordre du jour. Actuellement, la visite systématique s’applique surtout aux permis poids lourds, aux transports de passagers et aux conducteurs atteints d’affections potentiellement invalidantes. Pour la majorité des permis, le renouvellement reste une démarche administrative sans examen de conduite ni examen médical.