"L’intermédiaire sera le plus demandeur d’outils de vente à distance"

Le « sans contact » risque-t-il de devenir la norme ? Après la période de confinement et de déconfinement, la distribution « sans contact » ou la vente à distance dans le secteur de l’assurance va-t-elle se (re)développer massivement ? Allons-nous assister à la mise en place, par tous, de pratiques enfin vertueuses ? Rappelons que la vente à distance, chahutée dans notre secteur depuis quelques temps, a eu le vent en poupe dans cette période de confinement, et les acteurs du secteur de l’assurance qui ont eu recours à ces méthodes ont moins subis la crise, voire même en ont fait une opportunité. Les exemples ne manquent pas. Pour en parler, nous avons le plaisir d’interroger, à distance, Eric le Baron, Directeur Général Swisslife Assurance et Patrimoine et directeur de la distribution.

Beaucoup d’industries misent aujourd’hui sur la vente à distance.
À titre exemple, récemment, de grands constructeurs automobiles ont déclaré qu’ils misaient massivement sur l’achat à distance pour essayer d’endiguer la chute vertigineuse de leurs chiffres d’affaires. Nul doute que dans cette période, les Français vont limiter les contacts physiques avec leurs fournisseurs et essentiellement utiliser deux canaux majeurs : le téléphone et le digital. De nouvelles pratiques seront probablement héritées de cette crise. Partagez-vous ce point de vue ?  

Il faut tout d’abord clarifier ce qu’est la vente à distance dans l’assurance, et distinguer la vente à distance non intermédiée – c’est-à-dire « full online » – de la vente à distance accompagnée d’un conseiller.
La vente non intermédiée (« full online ») est généralement plébiscitée par les épargnants avertis et autonomes dans leurs choix de placement, leur permettant de souscrire un produit d’assurance sans l’aide d’un conseiller. Ce mode de distribution est un marché de niche mais qui connaît une croissance constante. Et cette dynamique devrait se poursuivre à l’ère de la digitalisation et au moment où l’assurance vie est un produit d’épargne qui se banalise et qui est perçu de plus en plus comme un produit de consommation courante. Je peux d’ailleurs vous donner quelques statistiques pour appuyer ce constat : selon une étude récente de Placement-Direct.fr réalisée avec l’institut Kantar, 64 % des épargnants détenteurs d’assurance vie en ligne se déclarent autonomes, contre 42 % seulement un an plus tôt…
De son côté, la vente à distance intermédiée existe depuis de nombreuses années, essentiellement par téléphone, sur certaines typologies de produits comme l’assurance santé. Il est évident que la période de confinement l’a développée sur un périmètre d’activité et une clientèle plus larges.
Jusqu’à présent, nous étions sur un modèle de souscription dématérialisée avec la possibilité pour le client de signer électroniquement, mais nécessitant une relation physique pour finaliser l’opération en face à face à travers le portail digital du conseiller commercial. Aujourd’hui, le souhait de nos commerciaux est de pouvoir vendre à distance auprès des clients ou prospects identifiés, de manière totalement dématérialisée. Associer le meilleur du conseil physique et des outils digitaux : c’est la stratégie phygitale développée par Swiss Life, composante forte de notre raison d’être !
Dans l’assurance, la vente à distance avait, à la lueur de quelques abus, mauvaise presse et faisait déjà l’objet d’une attention particulière de la part de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution. Pensez-vous que la situation de la vente à distance va évoluer dans ce secteur ? Les Français vont-ils plus utiliser la VAD dans notre secteur ?
Les pratiques mises en cause se réfèrent essentiellement au « hard selling », une technique de prospection agressive par téléphone qui est d’ailleurs en voie d’extinction et dont les pratiques ont été régulées. Parallèlement se développe la vente en ligne de certains produits dont les processus sont plus sécurisés et encadrés, comme en assurance vie ou en assurance emprunteur.
Même si le conseil et la relation client « physique » restent importants, les nouvelles procédures de vente à distance pourraient-elles instaurer une nouvelle norme ? Une nouvelle facilité souhaitée par les clients finaux ?
La place du conseil reste à mon avis prédominante dans la décision de placement. Ce conseil peut s’exercer à distance, mais les deux doivent pouvoir cohabiter ensemble pour apporter une expérience fluide entre un intermédiaire, son client ou prospect et la compagnie d’assurance. Il y a des attentes fortes vis-à-vis de ces nouvelles pratiques, mais qui nécessitent pour les acteurs du marché traditionnels (Swiss Life, Generali, Axa…) de revoir leurs processus de souscription actuellement basés sur la relation en face à face. C’est donc un des enjeux pour une compagnie comme la nôtre.
Toutefois, il me semble que ces pratiques ne sont pas généralisables à une clientèle plus haut de gamme qui peut faire face à des problématiques fiscales et patrimoniales complexes nécessitant l’intervention d’un conseiller en physique.
La dématérialisation du devoir de conseil est-elle aujourd’hui possible ?
Tout à fait, et c’est d’autant plus possible que la dématérialisation du devoir de conseil repose essentiellement sur des outils déjà digitaux. Les profils de risque des clients sont déterminés par des robots qui analysent un certain nombre de paramètres, comme l’horizon d’investissement ou le degré de risque accepté. Nos conseillers s’appuient donc sur ces préconisations pour conseiller le client sur son allocation d’actifs. Le devoir de conseil est donc parfaitement adapté à la dématérialisation de l’acte de vente.
Va-t-on un jour pouvoir également… prospecter à distance ?
Si l’acte de vente peut être effectué à distance, la recherche de prospects nécessite un contact physique pour rassurer les clients potentiels et augmenter les chances de convertir la prospection en vente. La prospection à distance reste donc compliquée, surtout dans l’assurance. C’est un peu la structure du marché de l’assurance qui veut cela : aujourd’hui, la quasi-totalité des personnes ne décideront pas elles-mêmes de l’orientation de leur épargne si elles ne sont pas approchées et conseillées par des experts.
Au final la VAD ne va-t-elle pas s’amplifier significativement dans le secteur de l’assurance ?   
La vente à distance va se généraliser mais dans un univers majoritairement intermédié s’appuyant sur des process et outils totalement dématérialisés. Toutefois, c’est l’intermédiaire qui sera le plus demandeur d’outils de vente à distance et les acteurs qui ne seront pas dans cette partie-là n’existeront plus. À nous d’en faire une priorité pour toujours être présents demain.
Nous remercions Eric le Baron et vous rappelons que nous avons décidé de traiter ce sujet, dans les mois à venir, en particulier :

  • Une enquête spéciale B to B sur les nouveaux enjeux de la vente à distance pour le secteur de l’assurance
  • Une émission spéciale sur Assurance TV (voir exemples)
  • Un article dans le prochain magazine print « Dessine-Moi l’Assurance » adressé aux décideurs du secteur de l’assurance (voir le dernier numéro en format digital)

Jean-Luc GambeyVovoxx
Compte Twitter
Compte LinkedIn

Vous souhaitez être contacté par notre rédaction ?

    Vous souhaitez être contacté par notre service commercial ?