Indemnités journalières : un coup de rabot contesté

En abaissant le plafond des indemnités journalières, le gouvernement cherche à réduire les dépenses de lAssurance maladie. Mais cette mesure suscite une levée de boucliers du côté des partenaires sociaux et assureurs.

Le décret est tombé, et avec lui, un changement de taille pour les salariés en arrêt maladie. Ce projet, initié par le gouvernement Barnier et adopté par la loi de finances de la sécurité sociale 2025, sera effectif à partir du 1er avril 2025 : lindemnité journalière maximale versée par la Sécurité sociale diminuera de plus de 20 %. Une mesure qui pourrait impacter plus de 13 millions de salariés. Une réforme budgétaire qui, sous couvert de maîtrise des finances publiques, interroge sur ses effets collatéraux : pouvoir dachat en berne, charges accrues pour les entreprises et une pression renforcée sur les organismes de prévoyance.

Un plafonnement revu à la baisse

Publié au Journal officiel du 21 février, le décret n°2025-160 entérine l’abaissement du plafond de revenu servant de base au calcul des indemnités journalières. Ce dernier passe de 1,8 à 1,4 fois le SMIC, réduisant ainsi le montant maximal perçu lors d’un arrêt de travail. Concrètement, l’indemnité brute journalière pour un salarié gagnant 3 243 € par mois (soit 1,8 SMIC) chutera de 53,31 € à 41,47 €, une baisse significative qui touchera en priorité la classe moyenne – et par ailleurs les jeunes et les salariés en CDD (non couverts par un régime de prévoyance collective).

Le gouvernement justifie cette mesure par la nécessité de contenir les dépenses de l’Assurance maladie, en forte augmentation ces dernières années. L’objectif affiché : une économie de 800 millions d’euros. Mais pour les organisations patronales et syndicales, ce calcul a un coût humain et économique non négligeable.

Un front uni contre la réforme

Le Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP) n’a pas tardé à réagir. Selon ses estimations, plus d’un salarié sur deux pourrait être concerné par cette réduction d’indemnités. Un transfert de charges qui, selon lui, mettra sous pression les employeurs tenus de compenser une partie de la perte de salaire de leurs employés en arrêt maladie. Pour Jacques Creyssel, président du CTIP et représentant du Medef, cette réforme ne s’attaque pas directement à la hausse des arrêts de travail, mais en reporte plutôt le coût sur les entreprises et les organismes de prévoyance.

Même constat du côté du Conseil de la Caisse nationale d’Assurance maladie (CNAM), qui a exprimé un avis unanimement défavorable en novembre dernier. Pour l’institution, cette réforme ne s’attaque pas aux causes structurelles de la hausse des arrêts de travail et risque de fragiliser les fondements de la Sécurité sociale.

Un ajustement déjà sur la table ?

Face aux critiques, la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet, avait reconnu, le 18 novembre 2024 au Sénat, que « si cette mesure d’économie de court terme était nécessaire, elle n’était pas satisfaisante. » Si elle défend une mesure budgétairement nécessaire, elle s’engage à revoir l’ensemble du système des indemnités journalières une fois le budget voté. L’enjeu : trouver un meilleur équilibre entre la responsabilité individuelle, celle des entreprises et la solidarité nationale, une culture de la taxation française en comparaison avec d’autres pays européens, et les enjeux d’économies.

En attendant, ce sont les salariés qui feront les frais de cette réforme dès le printemps, quand ils feront face à la hausse des tarifs de santé. Pour certains, l’arrêt maladie pourrait devenir un luxe que tous ne pourront plus se permettre.

Vous souhaitez être contacté par notre rédaction ?

    Vous souhaitez être contacté par notre service commercial ?