Sexisme ordinaire en milieu professionnel féminin

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Malgré ses valeurs et une forte proportion de femmes, l’économie sociale et solidaire (ESS) n’échappe pas au sexisme ordinaire. Une étude Harmonie Mutuelle sur le sujet met en lumière ce phénomène et ses impacts sur la santé au travail.

Dans un article publié le 11 juin dernier, Harmonie Mutuelle revient sur les agissements sexistes au sein des métiers dits « féminisés ». Loin d’être un sanctuaire préservé, l’économie sociale et solidaire (ESS), qui emploie majoritairement des femmes, est tout aussi touchée par les agissements sexistes que le reste du monde du travail. C’est le constat de départ de cette enquête menée auprès de 2 000 professionnels du secteur, dont les résultats complets ont été présentés lors d’une conférence en ligne le 19 juin dernier. Les premières analyses indiquent une prévalence du phénomène au moins équivalente à celle des autres entreprises.

L’ESS emploie 67 % de femmes, avec des pics à plus de 90 % dans certains métiers du soin. Cette hyper-féminisation n’empêche pourtant pas la persistance de stéréotypes, ni une répartition inégale des postes à responsabilités. Dans les crèches associatives, par exemple, les femmes constituent la quasi-totalité des effectifs mais n’occupent que 70 % des postes de direction.

Juridiquement, le Code du travail, via son article L. 1142-2-1, fournit une réglementation claire. Il définit l’agissement sexiste comme « tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». Marine-Pétroline Soichot, consultante, insiste sur un point clé de cette définition : « La définition stipule : ayant pour objet ou pour effet. Cela veut dire que même si les propos ou le comportement se veulent bienveillants, ils constituent un agissement sexiste, s’ils ont pour conséquence de réduire la personne visée à son genre. » L’intention de l’auteur n’est donc pas le seul critère ; l’impact sur la personne visée est déterminant.

Ces comportements, souvent qualifiés de « sexisme ordinaire » (remarques, blagues douteuses), constituent la base d’une pyramide de violences. Ils ont des conséquences directes sur la santé et les conditions de travail. Emmanuelle Paradis, cheffe de projet chez Harmonie Mutuelle, souligne que ces agissements génèrent « du malaise, de la colère qui se greffent sur les autres facteurs qui dégradent les conditions de l’activité ». Ils peuvent devenir « l’étincelle qui rend la situation explosive » dans des contextes professionnels déjà sous tension.

Face à ce constat, la responsabilité de l’employeur est double. Il doit d’une part traiter les situations lorsqu’elles se présentent, notamment via le rôle de sensibilisation du manager. D’autre part, il doit agir sur l’organisation même de l’entreprise pour prévenir la survenue de ces comportements. Le retour de congé maternité est un exemple cité comme une « zone de tous les dangers » par Marine-Pétroline Soichot, un moment propice aux discriminations où l’accompagnement est essentiel pour maintenir l’égalité professionnelle.

La démarche de prévention implique une meilleure communication et un temps d’échange pour discuter de ces habitudes sociales ancrées. Comme le résume Emmanuelle Paradis, « il faut mettre ces habitudes et ce contexte en discussion ». Cela concerne autant les relations internes à l’entreprise que celles avec les publics externes (usagers, patients), qui peuvent eux-mêmes être à l’origine d’agissements sexistes. L’enjeu est de déconstruire des automatismes pour assurer une reconnaissance professionnelle qui ne soit pas filtrée par le genre, conformément aux valeurs d’égalité portées par la société et inscrites dans la loi.

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