Déblocage anticipé de l’épargne salariale : le diable se cache encore dans les détails

La loi du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a apporté plusieurs évolutions aux dispositifs d’épargne salariale. Hubert Clerbois, président, d’EPS Partenaires, société de conseils dans les domaines de l’épargne salariale, de l’épargne retraite et de la protection sociale livre une synthèse utile aux conseillers.

La récente loi sur le pouvoir d’achat prévoit une fenêtre de tir permettant un déblocage anticipé de l’épargne salariale ? Comment fonctionne concrètement ce dispositif ?

Pour commencer, soulignons que le montant total du déblocage s’élève à 10 000 € nets de prélèvement sociaux. Ces derniers, s’appliquent à hauteur de 17,2 % sur le montant des plus-values.

Il est donc possible de sortir plus de 10 000 €, selon le niveau des gains acquis sur son épargne salariale (à confirmer sans doute par une circulaire car ce sera bien compliqué dans la pratique !). Rappelons aussi que seuls les prélèvements sociaux sont dus (prélevés à la source par le teneur de compte au moment du paiement) et que les gains sont exonérés d’impôt sur le revenu.

Ensuite, le déblocage n’est permis que jusqu’au 31 décembre 2022 et ne concerne que les sommes versées dans un plan d’épargne entreprise (PEE) avant le 1 janvier 2022. L’épargne acquise dans le PERCO et le PERECO est exclue du dispositif. Il en est de même pour celle investie dans des fonds solidaires, dans les comptes courants bloqués, même s’ils sont en perte de vitesse et, sauf accord de l’entreprise, dans l’actionnariat salarié.

Par ailleurs, la loi ne cite que l’intéressement et la participation. Les sommes issues de l’abondement de l’employeur et des versements volontaires des titulaires des comptes, salariés comme dirigeants, ne sont pas concernées a priori. Cependant, une circulaire questions-réponses du ministère du Travail, devrait apporter des précisions, notamment sur la question de l’abondement.

Cela fait beaucoup de conditions. Y-en-a-t-il d’-autres ?

Il y a d’autres conditions liées à l’utilisation des fonds débloqués. La loi prévoit qu’ils doivent servir à financer l’achat de biens ou de services sans plus de précisions. Les épargnants devront conserver leurs justificatifs d’achats liés à l’utilisation de ce déblocage en cas de contrôle (un billet d’avion pour se rendre dans un ile au soleil est-il autorisé ?). Les teneurs de compte devront de leur côté déclare à l’administration fiscale les personnes qui ont réalisé des déblocages sur leur PEE.

Comment la nouvelle PPV, qui succède à la prime dite « Macron » s’insère-t-elle dans ce dispositif ?

La nouvelle prime de partage de la valeur, la PPV, est pérennisée dans le temps. La prime s’élève au maximum à 3000 €, mais ce montant peut être doublé en cas d’existence d’un accord d’intéressement dans l’entreprise. Cette prime va être exonérée d’impôt sur le revenu et de CSG -CRDS pour tous les salaires inférieurs à 3 SMIC jusqu’au 31 décembre 2023. L’employeur de son côté est soumis au forfait social.
A la différence de l’intéressement, le montant de la PPV peut être variable selon l’ancienneté et la classification du salarié.

Pour l’intéressement, quelles sont les nouveautés ?

Deux petite nouveautés sont apparues cet été avec la loi. La première concerne durée de l’accord d’intéressement qui peut atteindre désormais 5 ans. La seconde a trait à la mise en place de l’accord d’intéressement qui peut à présent être instauré par décision unilatérale de l’employeur dans les entreprises de moins de 50 salariés. Auparavant, seules les TPE de moins de 11 salariés bénéficiaient de ce mode allégé de mise en place.

Revenons sur le déblocage de l’intéressement et de la participation. Que pensez-vous de cette solution ?

Ce type de dispositif a été utilisé plusieurs fois au cours des 20 dernières années pour des bilans qui ont été assez mitigés et ont souvent été des « usines à gaz » en terme de gestion. Les retraits anticipés, en tant que mesures pour soutenir la consommation ou le pouvoir d’achat, sont surtout utiles pour les salariés qui se situent dans la fourchette basse de l’échelle des salaires dans l’entreprise. Or, ces dernières sont celles qui épargnent le moins car elles choisissent très souvent de capter directement leurs primes de participation et d’intéressement lorsque celles-ci sont mises en paiement.

Propos recueillis par Jean-Charles Naimi

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