Assurabilité locale : l’alerte du Groupe SCET

Face à l’addition des chocs climatiques, sociaux et financiers, le Groupe SCET alerte : jusqu’à 5 100 communes cumulent exposition élevée et fragilité budgétaire. Son livre blanc plaide pour une réponse publique coordonnée et une refonte du marché.

Le Groupe SCET publie « L’assurabilité des territoires : une affaire d’État ? », un livre blanc qui acte la fin d’un cycle pour les collectivités. Pendant des décennies, des contrats d’assurance peu coûteux et généreux ont prévalu. Ce modèle s’érode : des communes voient leurs primes multipliées par deux à quatre, avec des garanties restreintes. Des résiliations unilatérales surviennent, 41 % avec un préavis inférieur à quatre mois, et certains appels d’offres restent sans réponse. Selon l’AMF, environ 1 500 collectivités sont touchées par au moins l’un de ces symptômes.

L’étude pointe un risque d’inassurabilité systémique à l’horizon 2050. Sur la base des projections de France Assureurs, la sinistralité liée aux catastrophes naturelles pourrait doubler, générant 50 à 70 millions d’euros de charges annuelles supplémentaires pour les budgets locaux. La montée des sécheresses, submersions marines, inondations et tempêtes fragilise particulièrement le Sud et l’Ouest. Au total, 12 900 communes se situent dans les départements les plus vulnérables, dont 5 100 présentent en outre un contexte financier tendu.

Le marché apparaît dysfonctionnel et peu attractif. La concentration autour de deux acteurs, après des années de guerre des prix, a creusé un déséquilibre : entre 2017 et 2022, les primes ont reculé de 18 % tandis que la sinistralité progressait de 23 %, portant le ratio sinistres/primes à 75 %. La soutenabilité du système d’assurance local est ainsi questionnée, dans un contexte de climat et de tensions sociales où la prévoyance publique devient un enjeu.

Le livre blanc appelle une action publique coordonnée autour de deux axes. D’abord, anticiper et prévenir : intégrer la prévention dans la planification (PLU, PPR, PCS), établir un référentiel national porté par la Caisse Centrale de Réassurance, adapter les régimes assurantiels (renforcement du CatNat, extension aux risques émergents comme les émeutes), et développer des solutions mutualisées locales, y compris des captives d’assurance. Pour les communes les plus exposées, une couverture publique résiduelle serait conditionnée à des engagements concrets de prévention. 

Ensuite, assainir et professionnaliser le marché : encadrer les pratiques (préavis, franchises), renforcer les compétences locales via des référents du risque formés par le CNFPT, améliorer l’inventaire du patrimoine assurable grâce à des outils numériques, et cibler les biens critiques pour concentrer l’assurance sur les risques majeurs. Un dialogue renouvelé entre collectivités et assureurs est préconisé, fondé sur des dossiers plus clairs et une approche partenariale.

« La soutenabilité du système d’assurance est devenue un enjeu de résilience territoriale. L’État, les assureurs et les collectivités doivent construire ensemble une réponse durable, combinant prévention, régulation et solidarité », conclut Romain Lucazeau, directeur général du Groupe SCET.

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