En redéfinissant la chaîne de valeur, l’assurance embarquée ouvre de nouvelles perspectives pour combler le déficit de dstrprotection et repenser les modèles de distribution.
L’assurance embarquée, intégrée directement dans des produits ou services du quotidien, s’impose comme un levier de transformation pour un secteur confronté à de multiples défis. Ce modèle, en pleine structuration, pourrait générer plus de 3 000 milliards de dollars de valeur d’ici 2030, selon les dernières estimations partagées par Fintech Futures. En mettant en relation offre et demande dans des contextes plus pertinents et accessibles, cette approche permettrait à la fois de renforcer la couverture des populations, de créer de nouveaux relais de croissance pour les assureurs et d’innover dans l’expérience client.
Pour les professionnels de l’assurance, l’innovation liée à l’API (Application Programming Interface) et à l’IA (intelligence artificielle) devient centrale, facilitant l’intégration de solutions de couverture dans les parcours d’achat numériques, comme le montre déjà la montée de l’assurance affinitaire ou des partenariats avec les plateformes numériques. Ces dynamiques pourraient contribuer à réduire le protection gap, c’est-à-dire l’écart entre les couvertures disponibles et celles réellement souscrites, une problématique récurrente dans les débats sur l’inclusion financière et la résilience patrimoniale.
Un modèle disruptif face à l’inefficacité du système traditionnel
La promesse de l’assurance embarquée ne réside pas uniquement dans ses volumes potentiels. Elle répond surtout à une crise structurelle du modèle assurantiel. Alors que les produits proposés sont souvent jugés opaques, mal adaptés ou inaccessibles, les assureurs peinent à capter une demande fragmentée, peu éduquée aux enjeux assurantiels et encore largement méfiante.
Sur le plan économique, cette inefficacité se traduit par des coûts de distribution qui représentent jusqu’à 50 % du coût total pour les assureurs, selon McKinsey. Malgré leur expertise en gestion des risques, les acteurs traditionnels peinent à adapter leurs produits à la réalité des données en temps réel, et sont freinés par des réglementations héritées de l’ère pré-numérique.
L’exemple d’Ant Group : quand l’assurance devient un service de proximité
En Chine, Ant Group illustre la puissance de ce modèle. Grâce à sa plateforme numérique adossée à Alipay, le géant a conçu une offre de micro-assurance pour les zones rurales, souvent négligées par les assureurs historiques. Résultat : 500 millions d’utilisateurs, 90 assureurs partenaires, et des produits accessibles dès 0,15 dollar. L’assurance santé “Haoyibao” ou la retraite “Quanminbao” en sont des exemples, répondant à des besoins concrets avec une interface fluide.
Cette intégration dans les écosystèmes numériques, banques, superapps, marketplaces, permet de proposer des services assurantiels en contexte, au moment opportun, tout en collectant des données pour affiner la tarification et la gestion des sinistres.
De nouveaux intermédiaires et une chaîne de valeur repensée
La diffusion de l’assurance embarquée ne repose pas seulement sur les assureurs ou les géants de la tech. Une nouvelle génération d’intermédiaires, notamment des agents généraux digitaux (MGAs), des plateformes SaaS (Software as a Service) ou des néobanques, joue un rôle clé dans cette transformation.
Des entreprises comme Uber, Amazon ou Paytm explorent ces modèles pour proposer à leurs utilisateurs, employés ou vendeurs, des garanties santé, auto ou revenu, flexibles et adaptables. En contrepartie, elles bénéficient d’un meilleur engagement client et de nouvelles sources de revenus, dans une logique de service global.
Le mouvement vers une désintermédiation partielle de l’assurance est donc en marche, avec une fragmentation des fonctions historiques (souscription, distribution, gestion des risques), désormais modulaires et interopérables. Cette recomposition ouvre la voie à un modèle plug-and-play de l’assurance, centré sur l’usage, les données et l’instantanéité.
Quels enjeux pour les assureurs français ?
Pour les assureurs traditionnels, notamment en France, ces évolutions soulèvent des questions stratégiques majeures. Comment repenser les offres et la relation client à l’heure de l’assurance embarquée ? Quels partenariats nouer avec des acteurs technologiques ou de la distribution ? Comment faire évoluer la réglementation pour accompagner ce mouvement sans compromettre la protection des assurés ?
Les professionnels du secteur doivent anticiper l’impact de cette rupture numérique sur leur modèle économique et sur la valeur client. Des chantiers autour de l’éducation financière, de la gestion des données personnelles ou de l’interopérabilité des systèmes s’imposent, afin d’aligner les produits avec les usages et les attentes des assurés.

