L’intelligence artificielle au cœur du contrôle fiscal

Une mutation technologique qui redéfinit les règles de conformité pour les particuliers comme pour les entreprises.

La lutte contre la fraude fiscale prend un tournant décisif avec l’intégration croissante de l’intelligence artificielle (IA) dans les procédures de contrôle. En 2024, plus de 16,7 milliards d’euros ont été recouvrés par la Direction générale des finances publiques (DGFIP), marquant une étape significative pour les autorités fiscales françaises. Avec une hausse programmée de 25 % du nombre de contrôles d’ici 2027, cette dynamique pose de nouveaux défis aux contribuables, en particulier les détenteurs de patrimoine important et les entreprises à forte exposition au risque.

Pour les professionnels de l’assurance, de la gestion de patrimoine ou du conseil fiscal, cette évolution appelle à une vigilance renforcée. Elle suppose également une meilleure compréhension des outils d’IA utilisés dans l’identification des comportements fiscaux suspects. L’interconnexion croissante des bases de données et l’exploitation des traces numériques, y compris les réseaux sociaux ou les flux bancaires, modifient profondément la notion de confidentialité et la gestion du risque de contrôle.

Un paradigme fiscal en pleine redéfinition

Les nouvelles méthodes de ciblage ne se contentent plus de vérifier les montants déclarés. L’algorithme scrute désormais l’ensemble du mode de vie, l’organisation patrimoniale, les structures juridiques, et même les interactions en ligne. Comme le souligne Malek Ziane, fondateur du cabinet Noun Partners, « la simple incohérence perçue entre un train de vie et une déclaration fiscale peut déclencher une vérification automatisée ».

Les particuliers fortunés sont particulièrement concernés par cette évolution. En 2024, plus d’un million de contrôles ont été réalisés, un chiffre en nette augmentation par rapport aux 810 000 relevés en 2022. Les autorités scrutent avec attention les montages complexes, les comptes à l’étranger, les successions et les donations mal documentées. Dans ce contexte, les notaires sont appelés à numériser l’ensemble des actes de transmission afin de faciliter l’interopérabilité des données.

L’entreprise face à l’automatisation du fisc

Du côté des entreprises, les secteurs historiquement sensibles comme l’immobilier ou la restauration-hôtellerie restent dans le viseur de l’administration fiscale, notamment en matière de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Le manque à gagner estimé sur cette taxe est évalué entre 6 et 10 milliards d’euros par an.

Cette mutation du contrôle impose aux entreprises une nouvelle logique de conformité proactive. Il ne s’agit plus seulement de respecter la loi, mais de pouvoir en démontrer la conformité de façon continue. Cette approche stratégique de la conformité réglementaire, renforcée par des outils numériques de suivi, devient un enjeu de gouvernance pour les directions juridiques, financières et assurantielles.

Conséquences pour le secteur de l’assurance et du patrimoine

Pour les assureurs et les gestionnaires de patrimoine, ce contexte impose une montée en compétence sur les risques fiscaux automatisés. L’innovation dans les services, la transparence dans les mécanismes d’optimisation patrimoniale, et la traçabilité des flux deviennent des critères de solidité dans la relation client. De plus, l’anticipation des risques de requalification ou de contestation fiscale fait désormais partie intégrante de l’accompagnement assuré.

Cette transformation appelle aussi à renforcer la coordination entre les professions réglementées (notaires, avocats, experts-comptables) et les acteurs du monde assurantiel, afin de sécuriser les parcours de transmission et d’investissement. Dans une ère de surveillance permanente, la clarté devient une valeur assurantielle.

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