En afrique, l’assurance numérique à l’heure de l’IA

L’essor des technologies d’intelligence artificielle transforme en profondeur l’assurance africaine. Accessibilité, personnalisation, efficience : les insurtechs repensent les modèles pour toucher les populations jusque-là exclues du système.

Le marché africain de l’assurance est évalué à 92,9 milliards de dollars en 2024 et pourrait atteindre près de 161 milliards de dollars à l’horizon 2033, selon les dernières projections. Ce dynamisme repose notamment sur la montée en puissance des outils numériques, le développement de la bancarisation mobile, et la recherche de solutions adaptées aux réalités locales. Pourtant, le taux de pénétration reste faible : environ 3 % contre une moyenne mondiale de 6,1 %. Ce contraste souligne l’ampleur des besoins et l’opportunité de l’innovation inclusive.

Dans un entretien accordé à Heirs Insurance Group, Peace Okhianmhense-Philips, responsable du numérique du groupe, revient sur les tendances structurantes de 2025 en matière d’assurance en Afrique, mettant en lumière l’impact de l’intelligence artificielle (IA) et de la transformation digitale sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

L’intelligence artificielle s’impose comme moteur d’accessibilité

L’un des tournants majeurs identifiés concerne l’intégration de l’IA dans les services d’assurance. Des assistants virtuels conversationnels permettent déjà de fluidifier l’expérience client, notamment dans la gestion des sinistres. Heirs Insurance a ainsi déployé un chatbot nommé Prince, accessible via WhatsApp, pour répondre aux questions fréquentes et faciliter le renouvellement des contrats. Ces outils, disponibles à toute heure, réduisent les délais de traitement et s’adaptent à la diversité des profils, même en dehors des grandes zones urbaines.

L’usage combiné de l’IA et de services hors ligne comme les plateformes USSD (Unstructured Supplementary Service Data), accessibles via un simple code sur mobile, élargit l’inclusion. La solution *1100# permet ainsi aux clients de renouveler leur contrat sans connexion internet. En ciblant les zones rurales et les populations non connectées, l’insurtech répond à une problématique centrale : faire de l’assurance un droit accessible à tous.

Nouer des partenariats pour toucher toutes les franges de la population

La généralisation de l’assurance passe également par des alliances stratégiques avec les opérateurs télécoms, les fintechs et les plateformes numériques. Ces collaborations permettent d’intégrer des offres dans les écosystèmes du quotidien, favorisant une innovation centrée sur les usages. Pour Peace Okhianmhense-Philips, la clé réside dans l’adaptation des canaux de distribution, mais aussi dans la modularité des produits, comme la micro-assurance embarquée dans des offres mobiles ou financières.

Ces partenariats répondent à des enjeux d’efficacité opérationnelle, en réduisant les coûts d’acquisition et en favorisant une meilleure connaissance client. À terme, ils facilitent aussi l’intégration de solutions adaptées à la gestion des risques climatiques ou à la couverture santé, deux axes majeurs de développement en Afrique.

Miser sur les données et les talents pour réussir la transformation

La collecte et l’analyse des données sont au cœur de cette révolution numérique. Mieux comprendre les comportements d’achat, les profils de risque et les besoins réels permet de concevoir des offres plus pertinentes. Dans cette logique, Peace Okhianmhense-Philips appelle les acteurs à adopter une culture orientée data pour guider la conception produit et le pilotage stratégique.

L’évolution technologique exige également des compétences adaptées. L’éducation aux technologies émergentes, la formation continue des équipes et la montée en puissance de profils hybrides (entre business, tech et relation client) sont présentés comme des leviers essentiels pour accompagner la croissance durable du secteur. Il s’agit moins de calquer des modèles venus d’ailleurs que d’imaginer des solutions en phase avec les réalités culturelles, sociales et économiques du continent.

Une dynamique de transformation tournée vers l’impact

L’ensemble de ces initiatives s’inscrit dans une démarche résolument tournée vers l’impact social. L’objectif est d’intégrer l’assurance dans les usages du quotidien sans ajouter de complexité. Cette philosophie de « démocratisation de l’accès à la protection » repose sur des outils simples, des offres lisibles, et une écoute constante des communautés.

Pour les professionnels du secteur, cette mutation impose de dépasser les logiques historiques centrées sur le produit pour adopter une approche orientée utilisateur. L’avenir de l’assurance africaine dépendra de cette capacité à combiner technologie, inclusion et résilience, dans une perspective de long terme.

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