Le Fonds de garantie des victimes alerte sur une progression des sinistres impliquant des conducteurs non assurés ou en fuite, notamment avec l’essor des engins de mobilité individuelle.
Le Fonds de garantie des victimes (FGV), chargé d’indemniser les personnes accidentées par un conducteur non assuré ou non identifié, observe une nouvelle hausse des sinistres en 2024. L’organisme a versé près de 123 millions d’euros pour prendre en charge les préjudices subis par 7 996 victimes, soit une augmentation de 3,3 % par rapport à l’année précédente. Ce constat alarme les professionnels de l’assurance alors que le phénomène reste officiellement marginal mais tend à s’aggraver sur le long terme.
Outre les conducteurs sans assurance, l’augmentation des délits de fuite (+8,8 %) et l’usage croissant des engins de déplacement personnel motorisés non couverts (trottinettes électriques, gyropodes, monoroues) contribuent à cette dérive. En 2024, 446 blessés et cinq décès dus à ces engins ont été pris en charge par le FGV, représentant une hausse annuelle de 22 %.
Une obligation souvent méconnue ou ignorée
La recrudescence des incidents pose la question du respect de l’obligation d’assurance responsabilité civile, qui couvre les dommages causés à autrui, mais pas ceux infligés au véhicule de l’assuré lui-même. Ce cadre réglementaire, essentiel au bon fonctionnement du système d’indemnisation en cas de sinistre, semble encore peu intégré par certains usagers, en particulier les jeunes et les populations précaires.
Le directeur général du FGV, Julien Rencki, souligne que cette situation s’explique notamment par des facteurs économiques. En période d’inflation, certains usagers font le choix risqué de ne pas s’assurer, espérant échapper à tout accident ou contrôle. Pourtant, en cas de sinistre, ces conducteurs s’exposent à des dettes considérables, pouvant s’élever à plusieurs centaines de milliers d’euros après indemnisation des victimes.
Un risque juridique et financier sous-estimé
Le non-respect de l’obligation d’assurance reste lourdement sanctionné. L’absence de couverture entraîne une amende forfaitaire de 750 euros, qui peut atteindre 3 750 euros en cas de récidive. Ces montants sont comparables, voire supérieurs, au coût annuel moyen d’une assurance automobile en France, évalué à 722 euros selon le comparateur Assurland.
Mais au-delà de la sanction financière immédiate, c’est bien la responsabilité civile du conducteur fautif qui est engagée. Le FGV, financé par une contribution prélevée sur chaque contrat d’assurance, exerce ensuite un recours contre les conducteurs non assurés afin de recouvrer les sommes versées aux victimes. Cette procédure peut plonger les fautifs dans un endettement durable et compromettre leur avenir économique.
Une sensibilisation encore insuffisante face aux nouvelles mobilités
La forte progression des sinistres liés aux engins de mobilité légère, comme les trottinettes électriques, témoigne d’une inadéquation entre les usages récents et la perception de l’obligation d’assurance. Alors que ces véhicules sont de plus en plus présents en zone urbaine, notamment auprès des jeunes actifs et des livreurs, la couverture reste insuffisante, en dépit des campagnes d’information. L’absence d’infrastructures dédiées, combinée à une sous-estimation du risque, accroît la probabilité d’accidents impliquant des tiers.
Pour les professionnels de l’assurance et les institutions publiques, ce phénomène souligne l’urgence de renforcer les actions de prévention, d’éducation routière et de simplification de l’accès à l’assurance, notamment pour les publics précaires ou jeunes. L’intégration de la couverture responsabilité civile dans les dispositifs de location ou d’abonnement de véhicules pourrait constituer une piste d’innovation pertinente.

