L’assuré devient un rempart contre la fraude au tiers payant

La fraude à l’assurance santé coûte chaque année des millions d’Euros et menace l’équilibre du système. Entre consultations fictives et détournements liés au tiers payant, les impacts financiers sont conséquents pour l’ensemble des parties prenantes à l’assurance santé. Une tribune intégrale de Fabien Crépiat.

Les assurés sont les premiers impactés. Mais loin d’être de simples victimes, ces derniers peuvent avoir un rôle clé dans le dispositif global de la lutte contre la fraude.

Comprendre la fraude au tiers payant

Le tiers payant, qui permet aux patients de ne pas avancer les frais de santé, facilite l’accès aux soins mais peut également être détourné. Plusieurs affaires récentes en France illustrent ces abus. Dans la région de Rouen, des dentistes et un comptable ont été accusés d’avoir détourné 500 000 € en facturant des soins fictifs [1]. Dans le domaine de l’audio et de l’optique un réseau a été démantelé pour une fraude qui s’élève à 7 millions d’euros, pas moins de « 75 caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et 54 mutuelles ont été visées » [2]. Une autre enquête a révélé un « réseau d’escrocs suspectés d’avoir fraudé plus de 8 millions d’euros à l’Assurance maladie » [3].

L’Assurance maladie nous révèle que le montant des fraudes des professionnels de santé était (en 2024) 2,5 fois supérieur à celui des assurés, malgré un nombre de fraudes presque 3 fois inférieur à celui des assurés[4].

Dans ces situations, l’assuré peut être involontairement impliqué si des soins fictifs sont facturés en son nom ou si des montants erronés apparaissent sur ses relevés de remboursement. Marc SCHOLLER[5] expliquait au Parisien qu’avec « le tiers payant, il peut y avoir des actes fictifs ou surfacturés en votre nom sans que vous le sachiez parce que vous n’allez jamais consulter votre relevé en ligne et n’avez donc pas l’information ». Comprendre le mécanisme de cette fraude est essentiel pour identifier les points de vigilance et mobiliser l’assuré dans la prévention.

Des impacts financiers et une confiance atteinte

« La santé n’a pas de prix mais elle a un coût » titrait La Dépêche le 1er octobre 2025. Ainsi, la fraude à l’assurance santé coûte chaque année des millions d’euros à la branche maladie de la Sécurité sociale et aux OCAM. Les actes de gestion consécutifs à la fraude ont aussi un coût (détection, prévention, recouvrement), sans compter que les sommes fraudées ne sont pas toujours recouvrées.

Cette fraude entraîne une augmentation des cotisations sociales et d’assurance, elle peut aussi atteindre la confiance des assurés envers le système d’assurance santé.

L’Assurance Maladie et les OCAM luttent activement contre la fraude. L’assuré, grâce à une vigilance accrue, pourrait contribuer fortement à détecter les fraudes, et ce plus rapidement que les organismes précités.

L’assuré, acteur central de la prévention

Depuis le 26 septembre 2025, l’Assurance Maladie envoie systématiquement un courriel pour chaque dépense remboursée[6]. Les assurés peuvent ainsi s’assurer que les soins facturés correspondent bien à ceux reçus.

Les assurés sont ainsi encouragés à examiner leurs relevés, conserver leurs factures et signaler toute anomalie. Chaque contrôle individuel peut contribuer à interrompre des réseaux frauduleux avant que les pertes ne deviennent plus importantes.

Un simple clic peut faire de l’assuré un acteur central de la protection du système de santé en signalant un remboursement suspect d’un soin ou d’un acte médical.

Conclusion

La lutte contre la fraude à l’assurance santé n’est pas uniquement l’affaire de la branche maladie de la Sécurité sociale ou des OCAM. Chaque assuré peut devenir le premier maillon de la lutte contre la fraude en contrôlant et en signalant toute anomalie dans ses remboursements,

Dans cette bataille, la vigilance de chacun contribue à la sécurité et à la préservation de notre modèle d’assurance santé.

[1] Ouest France

[2] Radio France

[3] France info

[4] Ameli

[5] Directeur délégué de l’Assurance Maladie en charge de l’audit, des finances et de la lutte contre la fraude

[6] La Dépêche

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