Ostéopathie : alerte sur le risque de déremboursement

L’Unité pour l’ostéopathie (UPO) lance une alerte nationale face à une recommandation du Sénat visant à exclure les soins ostéopathiques des remboursements des contrats responsables et solidaires des complémentaires santé. Une décision qui pourrait impacter directement les patients, le principe de mutualisation et la cohérence du modèle solidaire français.

La recommandation émise en septembre 2024 par le Sénat visant à retirer l’ostéopathie du périmètre des soins remboursés dans les contrats responsables et solidaires des mutuelles complémentaires santé suscite une vive réaction du secteur. Ces contrats, qui représentent plus de 96 % des souscriptions, pourraient ne plus couvrir une discipline pourtant plébiscitée par les patients. L’Unité pour l’ostéopathie (UPO) a décidé de lancer une pétition nationale pour alerter les assurés et les décideurs publics sur les risques d’une telle mesure pour le système de protection sociale.

L’assurance maladie ne prend pas en charge l’ostéopathie. Ce sont donc les complémentaires qui assument aujourd’hui en moyenne deux à trois séances annuelles par bénéficiaire, représentant moins de 3 % des prestations totales servies. L’UPO estime qu’un retrait du remboursement dans les contrats responsables ferait basculer une partie de la prise en charge sur l’assurance maladie, au moment même où cette dernière affiche un déficit de 15 milliards d’euros pour 2025.

Une profession réglementée intégrée au parcours de soins

L’ostéopathie est depuis 2007 une profession de santé réglementée, accessible à l’issue d’un cursus de cinq ans en établissement agréé. Le diplôme comprend 4 860 heures de formation, dont 1 500 heures de pratique clinique et près de 1 000 heures de sciences fondamentales. Les ostéopathes sont soumis à une assurance en responsabilité civile professionnelle, condition indispensable à l’exercice.

Selon un sondage réalisé par Odoxa en 2024, 53 % des Français ont consulté un ostéopathe au cours des cinq dernières années, et 84 % jugent cette pratique importante pour leur santé. Plusieurs publications scientifiques soutiennent l’efficacité des soins, notamment dans la prise en charge des lombalgies ou la réduction des durées d’arrêt de travail. Un essai contrôlé mené auprès d’enfants prématurés montre même une réduction significative de la durée d’hospitalisation avec un accompagnement ostéopathique.

Les enjeux d’équité et de solidarité remis en question

L’enjeu dépasse le cadre technique du remboursement. Pour l’UPO, retirer l’ostéopathie des contrats responsables reviendrait à fragiliser le principe de mutualisation des risques, pilier du modèle de l’assurance complémentaire à la française. Les patients seraient contraints de souscrire une garantie spécifique ou de renoncer aux soins, remettant en cause l’égalité d’accès et la liberté de choix thérapeutique. Une partie de la population, souvent la plus vulnérable économiquement, serait la première touchée par ce déremboursement.

Cette mesure interviendrait par ailleurs dans un contexte de défiance croissante entre certaines professions de santé, accusées de porter un discours délégitimant à l’encontre des ostéopathes. L’UPO dénonce une forme d’ »ostéobashing », alimentée par une lecture rigide des preuves scientifiques et par une volonté de reterritorialiser un champ d’intervention professionnelle.

Un débat aux résonances sociales et politiques

Pour les professionnels du secteur de l’assurance santé, cette controverse relance une réflexion plus large sur le périmètre des garanties collectives, les critères d’éligibilité au remboursement, et la place accordée aux médecines complémentaires. Elle questionne également la soutenabilité financière du modèle, les arbitrages à opérer dans un contexte budgétaire contraint, et le rôle des mutuelles, assureurs et institutions de prévoyance dans l’accompagnement de parcours de soin pluralistes.

Alors que la notion d’impact et d’utilité sociale devient un levier de différenciation stratégique pour les acteurs de l’assurance, la décision finale sur ce dossier pourrait résonner bien au-delà du cadre de l’ostéopathie. Elle révélera la capacité du secteur à concilier efficacité économique, innovation thérapeutique et attentes sociétales croissantes.

Nos derniers articles