Face à la montée des risques et aux tensions du marché, une initiative législative entend sécuriser l’accès à l’assurance pour les collectivités territoriales.
Alors que 60 % des collectivités territoriales françaises rencontrent des difficultés avec leurs assureurs, et jusqu’à 90 % pour les communes de plus de 10 000 habitants, une proposition de loi portée par Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, vise à structurer une réponse durable. Ce texte, soutenu par près de 200 sénateurs, ambitionne d’encadrer l’accès à l’assurance des entités publiques, à travers des mesures favorisant la concurrence, la régulation et la mutualisation des risques.
Des tensions croissantes dans la relation assureurs-collectivités
Le contexte est alarmant pour les décideurs publics. Dans un marché marqué par une hausse des sinistres climatiques, une judiciarisation croissante et un durcissement des critères de souscription, les collectivités peinent à trouver des assureurs volontaires. Les contrats sont souvent limités, coûteux, ou soumis à des exclusions problématiques, notamment pour des risques émergents comme les émeutes urbaines ou les cyberattaques.
Cette situation met en péril la continuité des services publics et la capacité des collectivités à protéger leur patrimoine, ce qui soulève une véritable alerte pour les acteurs du secteur de l’assurance institutionnelle.
Renforcer la régulation et la transparence du marché
Pour répondre à cet enjeu, la proposition de loi prévoit de renforcer le rôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), régulateur français du secteur de la banque et de l’assurance, dans le suivi du marché dédié aux collectivités. Elle introduit également la création d’un observatoire des tarifs assurantiels, afin d’assurer une meilleure transparence des prix appliqués au secteur public.
Ce levier vise à dynamiser la concurrence, favoriser l’entrée de nouveaux acteurs sur ce segment de marché souvent peu attractif pour les compagnies traditionnelles, et créer les conditions d’une meilleure équité d’accès pour les petites et moyennes collectivités.
Rééquilibrer les rapports contractuels et renforcer la médiation
L’un des axes clés de la réforme concerne les relations contractuelles entre assureurs et collectivités. Le texte propose d’encadrer plus strictement les modalités d’exécution des contrats, d’harmoniser les pratiques en cas de litige, et de renforcer le recours à la médiation en assurance. Le rôle du médiateur national serait ainsi élargi, permettant aux entités publiques d’avoir un recours plus efficace dans les cas de refus d’indemnisation ou de résiliation unilatérale.
Cet outil, déjà mobilisé dans le cadre de litiges entre particuliers et compagnies d’assurance, pourrait devenir un levier de dialogue constructif et de règlement alternatif des différends dans la sphère publique.
Une mutualisation des risques face aux émeutes
Enfin, la proposition de loi entend introduire un mécanisme de mutualisation du risque lié aux émeutes, en s’inspirant du régime d’indemnisation des catastrophes naturelles (CatNat). Ce nouveau dispositif permettrait d’assurer une prise en charge collective des dommages, en particulier lors de mouvements sociaux violents, devenus plus fréquents ces dernières années.
Ce modèle vise à assurer la résilience des territoires face aux aléas sociétaux, dans une logique de solidarité nationale et d’équilibre financier pour les assureurs. Il s’inscrit dans une dynamique d’innovation législative visant à anticiper les mutations des risques couverts par le secteur.
Vers une adoption rapide du texte ?
Pour Jean-François Husson, cette proposition législative arrive à point nommé. Elle traduit les recommandations issues des travaux de la commission des finances et apporte des solutions concrètes à une crise structurelle. Le soutien massif dont elle bénéficie au Sénat laisse entrevoir une adoption accélérée, dans l’intérêt des territoires et des citoyens.
Dans un secteur en pleine transformation, où l’innovation, la gouvernance des risques et la solidarité assurantielle sont au cœur des préoccupations, cette initiative marque un tournant pour l’assurance des entités publiques.