L’intelligence artificielle générative s’impose progressivement comme un levier structurant de transformation pour le secteur de l’assurance.
Longtemps cantonnée à des phases d’expérimentation, elle entre désormais dans une phase décisive où la question n’est plus celle de l’opportunité, mais bien celle de la performance et du passage à l’échelle. Une étude récente de Wavestone met en lumière les conditions nécessaires pour transformer les promesses de l’IA générative en gains économiques tangibles pour les assureurs.
Une adoption généralisée mais encore très hétérogène
Selon l’étude, tous les assureurs interrogés ont déployé au moins un cas d’usage d’IA générative ces deux dernières années. Pour autant, seuls 22 % déclarent avoir dépassé le seuil des vingt cas d’usage en production, révélant un écart significatif de maturité entre les acteurs. La majorité des initiatives restent concentrées sur la gestion, la souscription et les sinistres, tandis que les usages en relation client directe ou dans les fonctions support demeurent plus limités et fragmentés.
Cette hétérogénéité traduit une difficulté persistante à industrialiser les démarches. En France, seulement 17 % des cas d’usage parviennent réellement à passer à l’échelle, contre près de 30 % en Allemagne et au Royaume-Uni, soulignant un retard conjoncturel mais rattrapable du marché français.
L’industrialisation, clé de la création de valeur
L’étude montre que les assureurs disposant d’un socle technologique industrialisé, intégrant notamment des plateformes de génération augmentée par récupération et des chaînes MLOps, déploient leurs cas d’usage 2,5 fois plus rapidement et à un coût divisé par 2,5. À l’inverse, les acteurs reposant sur des développements ad hoc subissent des délais moyens supérieurs à six mois et des coûts dépassant 400 000 euros par cas d’usage.
L’industrialisation apparaît ainsi comme un prérequis pour transformer l’innovation en avantage compétitif durable, tant en matière de performance opérationnelle que de maîtrise des investissements en innovation et data.
Des gains de productivité réels mais encore partiellement captés
Les premiers résultats sont néanmoins significatifs. En moyenne, les assureurs français observent déjà des gains de productivité de l’ordre de 21 % sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Les projections à trois ans portent ce chiffre à 33 %, avec un potentiel particulièrement élevé sur les fonctions support, encore peu automatisées à ce stade.
Toutefois, la matérialisation financière de ces gains reste limitée. Moins de 20 % des assureurs associent réellement les directions des ressources humaines et de la finance à la démarche, freinant la transformation des gains opérationnels en leviers budgétaires et en performance économique mesurable.
Vers une transformation des métiers et des organisations
Au-delà des chiffres, l’IA générative interroge en profondeur les modèles organisationnels. Si le niveau d’acculturation progresse, avec près de deux tiers des collaborateurs se déclarant familiers de ces technologies, le véritable enjeu réside dans l’appropriation métier et l’évolution des rôles. L’étude souligne la nécessité de replacer l’humain au cœur des dispositifs, dans un cadre conforme aux exigences réglementaires, notamment celles de l’AI Act européen.
Enfin, l’émergence de l’agentique ouvre une nouvelle étape de transformation, avec des systèmes capables d’orchestrer des processus complexes de manière autonome. Près de trois quarts des assureurs y consacrent déjà un budget dédié, anticipant une redéfinition durable des standards opérationnels du secteur assurance.

