L’usage détourné du protoxyde d’azote s’impose comme un enjeu croissant de sécurité routière et de santé publique.
Longtemps cantonné à un usage médical ou alimentaire, le protoxyde d’azote, souvent désigné sous le nom de « gaz hilarant », est aujourd’hui au cœur de nouvelles préoccupations pour les pouvoirs publics et le secteur de l’assurance. Son inhalation à des fins euphorisantes, en forte progression chez les jeunes, est désormais identifiée comme un facteur aggravant d’accidents graves, notamment lors des périodes festives de fin d’année. Cette évolution rapide du risque interroge directement les mécanismes de couverture en assurance automobile et la capacité des acteurs à intégrer ces comportements émergents dans leurs politiques de prévention.
Une pratique en hausse aux conséquences sanitaires et routières
Selon les données de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et des centres d’addictovigilance, les cas d’intoxication et de complications liées à l’usage détourné du protoxyde d’azote ont triplé entre 2020 et 2023. Cette progression s’accompagne d’une augmentation notable des accidents de la route, avec des atteintes neurologiques parfois irréversibles. Près de 40 % des sinistres les plus graves concernent des conducteurs de moins de 25 ans, un public déjà identifié comme particulièrement exposé aux comportements à risque.
Les effets du protoxyde d’azote, bien que perçus comme transitoires, altèrent la perception, les réflexes et la coordination. Dans un contexte de conduite, ces troubles accroissent fortement la probabilité d’accident, au même titre que l’alcool ou les stupéfiants. Cette réalité renforce la nécessité d’une approche globale associant santé publique, sécurité routière et assurance.
Vers un durcissement du cadre réglementaire
Face à l’ampleur du phénomène, le ministre de l’Intérieur a récemment exprimé sa volonté de classer le protoxyde d’azote comme stupéfiant et d’interdire explicitement son usage détourné à des fins euphorisantes. Parmi les mesures envisagées figurent l’interdiction de consommation au volant et la possibilité de fermeture administrative des commerces impliqués dans une vente non conforme.
Ces évolutions réglementaires auraient des répercussions directes sur le secteur de l’assurance. La qualification du protoxyde d’azote comme substance stupéfiante renforcerait la base juridique permettant d’exclure certaines garanties en cas de sinistre, notamment lorsque la consommation est avérée et constitue une infraction.
Des impacts assurantiels clairement identifiés
Du point de vue assurantiel, l’usage de substances assimilées à des drogues au volant constitue un facteur d’exclusion classique dans les contrats d’assurance automobile. Comme le souligne Christophe Dandois, cofondateur de Leocare : « Dès lors que la consommation de protoxyde d’azote s’apparente à un usage de drogue, les conséquences assurantielles sont claires : en cas d’accident, les garanties dommages et corporelles du conducteur peuvent être exclues du contrat. »
Cette position met en lumière un enjeu central pour les assureurs : informer clairement les assurés sur les conséquences contractuelles de ces comportements, tout en renforçant les actions de prévention. Dans un contexte de hausse des sinistres corporels graves, la maîtrise de la sinistralité et la protection des victimes demeurent des priorités stratégiques pour le secteur.
Prévention, responsabilité et adaptation des offres
Au-delà de l’exclusion de garanties, l’essor de ce risque pose la question de la prévention ciblée, en particulier auprès des jeunes conducteurs. Les assureurs, en lien avec les pouvoirs publics et les acteurs de la sécurité routière, sont amenés à jouer un rôle accru dans la sensibilisation aux dangers du protoxyde d’azote. Cette démarche s’inscrit dans une logique plus large de responsabilité sociétale, au croisement de la santé, de la mobilité et de l’assurance.
L’émergence de nouveaux usages à risque souligne enfin la nécessité d’une adaptation continue des contrats, des politiques de souscription et des outils de prévention, afin de répondre à des comportements en constante évolution et à leurs impacts sur le patrimoine humain et financier.

