La troisième édition du baromètre santé-social de l’AMF et de la Mutualité Française révèle une stagnation, voire une dégradation, des indicateurs sanitaires et sociaux.
L’Association des maires de France (AMF) et la Mutualité Française présentent une nouvelle édition de leur baromètre santé-social, enrichi pour la première fois d’un indicateur sur la santé mentale. Ce dispositif suit l’évolution de grands marqueurs du bien-être des populations, en couvrant des domaines clés tels que l’accès aux soins, la santé environnementale, la petite enfance, le handicap ou encore la prise en charge du grand âge.
Les résultats montrent que les fragilités sociales et sanitaires persistent, malgré des efforts engagés par les collectivités et les acteurs mutualistes. Les départements connaissent des trajectoires divergentes, traduisant une géographie de plus en plus contrastée du bien-être social. Pour les professionnels de l’assurance, ces constats renforcent les enjeux liés à la prévention, à la protection sociale et à l’adaptation des couvertures aux réalités locales.
Un accès aux soins profondément fragilisé par les déserts médicaux
L’édition 2025 met en lumière la tension croissante autour de l’accès aux soins. Près de 65 % des Français déclarent avoir renoncé à des soins au cours de l’année, en hausse de trois points. Cette situation résulte de difficultés financières, de délais d’attente trop longs et d’un éloignement structurel des établissements de santé.
La démographie médicale demeure particulièrement déséquilibrée. Si la France compte un peu plus de 100 000 médecins généralistes, certains départements restent largement sous-dotés, comme l’Essonne ou la Seine-Saint-Denis, bien en dessous de la moyenne nationale. À l’inverse, les territoires de montagne et les grandes métropoles bénéficient d’un meilleur maillage.
Aujourd’hui, 87 % de la population vit dans des zones considérées comme des déserts médicaux, tandis que six millions de personnes ne disposent pas de médecin traitant. Cette situation concerne environ 400 000 patients en affection de longue durée, accentuant les risques de ruptures de parcours de soins.
Des préoccupations environnementales qui s’intensifient
La qualité de l’environnement reste un déterminant majeur de la santé, et les Français en sont pleinement conscients. Le baromètre indique que 72 % d’entre eux s’inquiètent des effets environnementaux sur leur santé, une hausse notable en un an. La pollution de l’air, à elle seule, est responsable de près de 40 000 décès chaque année, soit 7 % de la mortalité nationale.
La qualité de l’eau se dégrade également : en 2023, moins de 75 % de la population a eu accès à une eau respectant les normes relatives aux pesticides, représentant 5,5 millions de personnes de moins qu’en 2021. Les inégalités sociales et environnementales se superposent, touchant autant les zones rurales que les quartiers urbains densément peuplés.
Cet état des lieux rejoint les préoccupations des assureurs, pour lesquels la santé environnementale influence de plus en plus la sinistralité, la prévention et les modèles de couverture.
La santé mentale, un enjeu national en manque de moyens
La santé mentale occupe désormais une place centrale dans les problématiques sociales. Le baromètre révèle que 20 % de la population souffre de troubles psychiques chaque année, soit 13 millions de personnes. Ce domaine constitue également la première cause d’arrêts maladie de longue durée.
Les jeunes sont particulièrement exposés : un jeune sur quatre présente des signes de dépression, avec une prévalence encore plus élevée dans les territoires ultramarins. Pourtant, le manque de psychiatres compromet la prise en charge. Environ 7 % des lits de psychiatrie restent fermés faute de personnel, et 40 % des établissements déclarent une pénurie de psychiatres.
Cette situation questionne directement les stratégies de prévention, de prise en charge et d’accompagnement mises en œuvre par les complémentaires santé et les opérateurs assurantiels.
Des tensions persistantes dans les services sociaux essentiels
La petite enfance connaît une stagnation de l’offre : seules 60,3 places d’accueil sont disponibles pour 100 enfants de moins de trois ans, avec une pénurie persistante de professionnels. Les Ehpad, de leur côté, doivent concilier pénurie de personnel, disparités tarifaires et besoins croissants liés au vieillissement.
Les associations et les mutuelles alertent depuis plusieurs années sur la nécessité d’un équilibre entre les acteurs publics, privés lucratifs et non lucratifs pour garantir l’accessibilité financière et la qualité de l’accompagnement.
Le handicap reste également marqué par des écarts territoriaux importants, bien que le nombre de places d’accueil ait plus que doublé depuis 2004. Les besoins demeurent significatifs, en particulier dans les zones sous-dotées.

